En tant que coach d’équipe, je n’avais jamais lu le best-seller « Optimisez votre équipe » : c’est un régal. La « Fable » raconte l’histoire d’un coaching d’équipe, sans coach d’équipe attitré si ce n’est la nouvelle PDG de l’équipe de direction d’une entreprise de la tech américaine. Cette entreprise post start-up commence à connaître des difficultés de croissance et de résultats. C’est la raison pour laquelle un membre du Conseil d’administration fait appel à Kathryn pour prendre la responsabilité de l’équipe de direction. Une équipe de 8 directeurs qui tient entre ses mains le destin heureux ou malheureux de l’entreprise !

Le processus de coaching d’équipe, comme si vous y étiez

Grâce au « management » de Kathryn, l’équipe de direction comprend assez vite que les problèmes rencontrés par l’entreprise sont la manifestation des dysfonctionnements de l’équipe de direction. Pour faire simple, ce n’est pas une équipe.

  • Après un diagnostic d’équipe (observations des réunions d’équipe et interviews du CA), Kathryn organise 2 séminaires outdoor de son équipe. Et un suivi de sa progression, notamment durant les réunions de direction et sur un temps long de plusieurs mois. On est sur un process de coaching d’équipe assez classique.
  • A travers le modèle des 5 dysfonctions d’une équipe, Kathryn invite l’équipe à réfléchir à ses modes de fonctionnement et à comment les améliorer. C’est l’essence même du coaching d’équipe.
  • Pour traiter le manque de confiance, elle invite à des exercices de découverte interpersonnelle et mobilise le MBTI ! (J’adore 😊)
  • Elle souligne les problèmes d’ego qui font que l’équipe à une inattention portée aux résultats collectifs : chacun vise plutôt les résultats de sa direction ou sa carrière personnelle. Elle fait travailler ses équipiers sur la définition de résultats SMART, au-delà du profit : « acquérir 18 clients d’ici la fin de l’année ». Puis elle leur fait descendre collectivement l’objectif pour voir comment chacun contribue et s’entraide. « Vous êtes tous responsables des ventes ! ».
  • Elle leur fait intégrer leur manque de confrontation, en leur faisant exprimer combien leurs réunions sont ennuyeuses et les discussions ni passionnées, ni passionnantes. « Pourquoi vous ennuyez-vous davantage en réunion qu’en allant voir un film au cinéma ? »… « Parce que dans un film, il y a de la confrontation en permanence ! ». Et elle pose régulièrement des questions pour susciter la confrontation d’idées : c’est l’intelligence collective.
  • Enfin, elle arrive à pointer leur manque d’engagement et de responsabilisation auprès de l’équipe et des résultats collectifs. Elle leur fait découvrir comment ces deux leviers vont permettre d’aboutir aux résultats et redresser la boîte. Tout est pépite dans ce livre mais j’ai adoré quand elle demande à ses équipiers : « Quelle équipe adressez-vous en priorité, notre équipe de direction ou l’équipe que vous managez ? » Forcément, ils sont tous à dire qu’ils sont très mobilités par leur équipe. Et paf, recadrage ! « Non, l’équipe prioritaire est notre équipe de direction ».
  • Et puis il y a dans le processus la description de ces hauts et de ces bas vécus par l’équipe, les régressions, le temps nécessaire pour progresser, le fait que 2 membres de l’équipe démissionnent, et c’est OK… Tout comme dans un coaching d’équipe. Cela me rappelle un certain nombre de mes coachings d’équipe, des sujets de supervision pour un apprentissage clé : c’est OK, l’équipe change, certains comprennent qu’ils n’ont pas leur place dans cette équipe et vont trouver leur bonheur ailleurs.

La conclusion de la fable vient comme l’apothéose d’un coaching d’équipe : une entreprise qui redevient leader de son secteur et où les jeux politiques ont cessé au profit d’une saine coopération. Au niveau de l’équipe de direction et par effet de cascade, auprès de chaque collaborateur. C’est l’effet Waouh du coaching d’équipe : ça diffuse de partout.

Kathryn, PDG et coach d’équipe

Je trouve que dans ce conte, beaucoup est matière d’apprentissage pour embrasser la bonne posture de coach d’équipe.

  • Kathryn n’a aucune expérience dans le lead d’équipe de direction de ce niveau et encore moins dans le secteur de la tech. Sa grande compétence est la connaissance de la dynamique d’équipe.
  • Kathryn a une grande capacité méta pour repérer les comportements dysfonctionnels de l’équipe et les donner à voir à ses équipiers. Elle leur explique le modèle des 5 dysfonctions de Lencioni, elle renvoie ses observations pour les commentaires de l’équipe, elle méta communique régulièrement : « si je vous dis cela comme ceci c’est parce que… ».
  • En bonne coach d’équipe, elle pose des questions ouvertes à chaque membre de l’équipe et l’invite à s’auto-évaluer régulièrement  : « quels progrès avons-nous fait en tant qu’équipe ? »
  • Elle se focalise sur les interactions au sein de l’équipe plutôt que sur les individus. Avec une approche réflexive permanente pour cibler son intervention ou ne pas intervenir : « La mère en Kathryn voulait intervenir pour protéger Jeff… Mais elle avait décidé de s’abstenir ». Lorsqu’elle soulève les comportements inappropriés d’un équipier, ce n’est pas pour le rabaisser ou le disqualifier, c’est pour lui faire prendre conscience de la façon dont il sabote le travail d’équipe. Avec Kathryn, plus personne ne sort son ordi pendant les réunions (j’adore 😊).
  • Elle s’adapte au rythme de l’équipe et n’impose pas un programme tout fait comme un formateur. En bonne coach d’équipe, elle ne fait pas faire d’activités de team building : « nous ne nous tiendrons pas la main en chantant, ni ne nous promènerons tout nu » (c’est mon parti pris bien sûr 😊).
  • Elle subit les transferts négatifs de l’équipe à son endroit, des « attaques » verbales, et sait très bien les renvoyer à l’équipe comme la manifestation de son homéostasie, de son envie de ne surtout pas changer. Bref, elle a une bonne gestion émotionnelle et des phénomènes psychosociologiques.

Et si on pouvait faire mieux dans la vraie vie en matière de coaching d’équipe ?

C’est l’exercice de la fable qui fait de la PDG une wonder-woman du coaching d’équipe. Dans l’idéal, un coach d’équipe, tiers, neutre, aura plus de valeur ajoutée. Car le responsable d’équipe est un membre de l’équipe spécial qui contribue grandement à la dynamique d’équipe par son style de management et ses comportements.

Le petit point qui m’a surprise, c’est le fait que Kathryn n’ait pas fait poser un cadre / des règles de fonctionnement pour le travail de l’équipe au début du 1er séminaire. J’y vois le point fort de laisser l’équipe maturer ses règles au fur et à mesure du voyage dans son propre diagnostic de fonctionnement et sa propre progression. J’y vois un axe de progrès dans le fait que la pose de règles est aussi une excellente façon de méta communiquer sur le fonctionnement de l’équipe dans le respect ou l’irrespect desdites règles. Les règles définies par l’équipe donnent aussi des indications précieuses sur là où en est l’équipe, entre désir de conservation ou de transformation.

A part ça, un livre tout fait génial que j’ai ajouté à la bibliographie et à quelques contenus de ma formation au coaching d’équipe !

Patrick Lencioni. Optimisez votre équipe. Les cinq dysfonctions d’une équipe – une fable pour les dirigeants. Ed.  Un monde différent.

Juliette Ricou.